Pourquoi le lieu le plus représentatif de la sainte est sa maison et non pas un couvent? On trouve la réponse dans l’apartenance de Catherine au Tiers-Ordre dominicain. Après avoir endossé l’habit de tertiaire (ou “mantellata”), Catherine continua à vivre dans sa maison natale, en accord avec la nouvelle façon de vivre la consécration à Dieu introduite d’abord par saint François et ensuite adoptée par saint Dominique.
L’institution du Tiers-Ordre représenta une réponse à tous les fidèles laïques, hommes et femmes, qui bien que ne vivant pas dans un monastère comme les moines, désiraient pratiquer une vie chrétienne intense, inspirée par la spiritualité de l’un ou de l’autre Père fondateur. L’adhésion au Tiers-Ordre offre , la possibilità de vivre sa foi dans le monde. Dès le XIIIème siècle, cette proposition de “sainteté laïque conquit un grand nombre de persone, grâce à la force du message sous entendu : l’opportunité de vivre l’Evangile se présente à tous les stades de la vie et l’appel à une vie sainte n’est pas réservé qu’à un petit nombre, mais au contraire assume un caractère universel.
Sainte Catherine en est un exemple emblématique : le fait de vivre chez elle et dans les rues de la ville et non pas dans un couvent, le fait d’être laïque et non pas religieuse, ne l’empêcheront pas d’être en communion profonde avec Dieu et de vivre selon ses enseignements.
L’ensemble s’articule sur plusieurs espaces : un fois traversé le Portique des Comunes, nous arrivons dans une cour à “loggia” du XVI ème siècle, suivie par une seconde cour. A droite de cette dernière se dressent l’église du Crucifix et la chapelle des Confessions. De l’autre côté se trouve l’oratoire de la Cuisine. Toujours sur le côté gauche un escalier conduit à l’étage en dessous; c’est là que se trouve l’Oratoire de la Chambre.
Située sur le territoire de Fontebranda et appartenant à la guilde de l’Art de la Laine, la maison s’articule sur trois niveaux. Au cours de la première moitiédu XIVème siècle, elle fut louée au père de Catherine, le teinturier Jacopo Benincasa, en tant qu’atelier pour teindre les tissus et demeure de sa nombreuse famille.
Après le déclin de la famille Benincasa, l’édifice fut acheté par un autre teinturier. Puis en 1466, peu après la canonisation de sainte Catherine, la mairie de Sienne, poussée par les supplications des habitants du quartier, acheta la maison, pour qu’elle devienne un lieu de culte ouvert à tous.
Déjà à cette époque, existait une confraternité laïque dédiée à Catherine; c’était une association de fidèles qui avait pour but les oeuvres de charité, la pénitence et la prière.
Grâce à l’activité des confrères, soutenue par la générosité des fidèles, commença des activités de bien-faits qui continuèrent pendant des siècles, trasformant la maison en vrai sanctuaire abritant des oeuvres d’art qui évoquent la vie de la sainte.
Après que sainte Catherine fut proclamée Patronne d’Italie, le 19 Juin 1939, l’église de saint Antoine fut détruite pour pouvoir ériger le portique; ce qui agrandit l’accès au sanctuaire et facilita le passage des pèlerins et touristes.
Chaque commune d’IItalie contribua à sa réalisation en offrant la somme nécéssaire pour acquérir une brique, d’où le nom du portique. Les travaux, commençés en 1941, durent être interrompus à cause de la seconde guerre mondiale. Ils furent terminés en 1947.
Le seul élément ancien épargné, sur la droite, est le magnifique puits en travertin, datant de la fin du XVème siècle, début XVIème siècle.
Sous le portique se trouvent les bustes des papes, dont le pontificat a été étroitement lié à sainte Catherine : Pie II, le siennois Enea Silvio Piccolomini, qui la proclama Sainte le 29 juin 1461; Pie IX, qui en 1866 la proclama patronne de Rome, pour avoir convaincu le pape à rentrer dans la capitale; Pie XII, qui la nomma Patronne d’Italie le 19 juin 1939; Jean XXIII, qui en 1961, l’année du cinquième centenaire de sa canonisation, invita tous les chrétiens à la célébrer; Paul VI qui en 1970, la proclama Docteur de l’Eglise universelle “ étant donné sa vie édifiante, sa doctrine éminente et son efficacité bienveillante sur l’Eglise”; enfin Jean-Paul II, qui en 1999, la voulut Patronne d’Europe, en raison de son engagement extraordinaire à porter la paix dans l’Europe de son temps. Elle exhorta sans trêve les rois et les princes à constituer une société inspirée des valeurs du christianisme.
Sous le portique, à l’occasion des Fêtes annuelles en l’honneur de sainte Catherine, se déroule une cérémonie durant laquelle une commune italienne ou une association donne l’huile qui alimente la flamme de la lampe votive, voulut par les mères des soldats morts pendant la Seconde Guerre Mondiale. Cette lampe se trouve dans l’Eglise du Crucifix. Tous les pots en terre cuite et en porcelaine qui contenaient l’huile pour la lampe, sont exposés dans une niche située sur le côté droit de l’église et dans la petite librairie, à gauche de la cour d’entrée.
L’importance de l’église est due à la présence du crucifix en bois, par lequel sainte Catherine reçut les stigmates (du grec stigma: marque), c’est à dire des plaies semblables à celles que Jésus reçut durant la crucifixion.
L’évènement miraculeux se déroula à Pise où la Sainte s’était rendue en 1375, à la demande du pape Grégoire XI. Elle avait été chargée de convaincre les seigneurs de la ville à ne pas adhérer à la ligue anti-pape. Dans la Légende Majeure, Raymond de Capoue raconte que le 1er Avril de la même année, pendant qu’elle priait dans l’église de sainte Christine, Catherine vit descendre du crucifix devant lequel elle était agenouillée, cinq rayons de couleur rouge sang qui touchèrent ses mains, ses pieds et son coeur. Elle demanda tout de suite à Dieu que les stigmates soient rendues invisibles et avant que les rayons ne l’atteignent, leur couleur changea et ils devinrent resplendissants de lumière. Pendant tout le reste de sa vie, seule la sainte put les voir. Seulement au moment de sa mort elles furent visibles au commun des mortels. C’est en 1623 qu’Urbain XIII reconnut l’authenticité des stigmates de Catherine, après deux siècles de disputes internes.
Comme c’était le cas pour saint François d’Assise qui fut le premier saint à recevoir les stigmates, cette expérience fut l’apogée de son chemin spirituel et représente son identification à Jésus-Christ : Catherine devient pareil au Seigneur crucifié et comme lui, elle brûle du même désir de sauver les hommes. La volonté de ne pas faire voir les stigmates est la démonstration de son refus de transformer en spectacle cet événement miraculeux; ce qu’explique l’humilité qui caractérise tout son existence.
Au lendemain de la mort de Catherine, les siennois désiraient posséder le crucifix qui l’avait rendue parfaite icône de l’amour du Christ; après plusieurs tentatives, la Confraternité à elle dédiée réussit dans l’entreprise et en 1565 la croix en bois fut transportée à Sienne et plaçée dans l’Oratoire de la Cuisine. Toutefois, avec le temps, on commença à penser à un lieu plus adapté à la vénération. L’unique espace disponibile qui se trouvait devant l’oratoire était ce qu’on pensait être le jardin de la famille Benincasa. Entre 1614 et 1623 l’église du Crucifix fut construite en style baroque. On poursuivit sa décoration pendant plus d’un siècle.
On peut dater le crucifix, de l’école de Pise, aux alentours de la fin du XIII ème siècle. Il fut plaçé au centre de l’autel majeur, le 21 Mai 1623, après une procession solennelle qui passa dans les lieux de culte les plus importants de la ville. Il est enfermé dans un cadre à deux volets, à l’intérieur desquels sont représentés sainte Catherine et saint Jérôme pénitent, tout les deux oeuvre du siennois Bartolomeo Neroni, surnommé le “Riccio”.
Les nombreuses peintures qui décorent les parois de l’église parcourent des moments significatifs de la vie de Catherine, en particulier les résultats extraordinaires qu’elle obtint sur le plan politique au bénéfice de l’Eglise; entre autres, avoir réussi à faire revenir le pape à Rome, mettant fin à ce qu’on appelle “la captivité avignonaise” (1308-1377) et avoir rétabli la paix entre Florence et l’état pontifical, depuis longtemps en guerre. L’exception des actes de la sainte, ressentie par ses contemporains et pleinement comprise au cours des siècles, montre de quoi est capable une créature humaine, femme et presque analfabète, quand elle sait écouter la voix de Dieu, en lui consacrant sa propre existence.
Trois des quatre grandes toiles qui occupent la nef, sont dédiées à cet aspect de la vie de Catherine. A l’entrée , le premier tableau de la paroi de droite représente le Retour du Pape Grégoire XI à Rome, oeuvre du peintre Niccolò Franchini (1769), à côté, le tableau de Catherine qui exhorte Grégoire XI à revenir à Rome, exécuté par le bolognais Alessandro Calvi, surnommé le “Sordino”.
Sur la paroi opposée, nous trouvons Sainte Catherine assaillie par les soldats florentins, oeuvre réalisée par Galgano Perpignani en 1765. Elle évoque un des moments du travail de pacification entre Florence et la Papauté.
La quatrième toile, exécutée par Liborio Guerrini en 1777, illustre l’Aumône de Catherine, entourée de pauvres. Elle leur distribue du pain. En réalité, dans la Légende Majeure il est raconté qu’elle avait l’habitude de faire l’aumône la nuit, en la laissant devant la porte des familles indigentes. Elle agissait selon l’enseignement des Evangiles, dans lesquels il est écrit que l’aumône doit être cachée et que la personne qui la pratique ne doit pas se montrer.
Les peintures au dessus des deux autels sur les côtés du transept représente, à droite, à nouveau Sainte Catherine devant Grégoire XI en Avignon, oeuvre du XVIIIème siècle de Sebastiano Conca, et à gauche Sainte Catherine accueillie au paradis par la Madone et présentée à Jésus-Christ, tableau réalisé par Rutilio et Domenico Manetti en 1638. Sainte catherine est peinte selon une iconographie inhabituelle; elle porte le robe blanche mais sans le manteau noir, et sur la tête une triple couronne. Cette dernière nous renvoie à un épisode de la Légende Majeur : une femme qui s’appelait Semia, après avoir reçu un miracle de Catherine, avait rêvé de la sainte; celle-ci portait trois couronnes sur la tête – une en or, une en or et en argent avec des reflets rouges et une autre en or avec des pierres précieuses – à identifier avec la fameuse triple couronne auréole (ou corona aureola accidentalis) symbole de verginité, martyr et doctrine. Le tableau, réalisé seulement quelques années après l’identification des stigmates peut être considéré comme une des premières représentations sur toile de la glorification de la sainte.
Toujours dans le transept gauche, sur la paroi de gauche, s’élève la bannière peinte par Rutilio Manetti en 1630, représentant Sainte Catherine recevant les stigmates du Crucifix, sur commande de la Confraternité de la sainte. A côté de l’autel, s’ouvre une niche à l’intérieur de laquelle repose un reliquaire dans lequel est renfermé un fragment de son omoplate.
Sur les côtés du presbitaire se trouvent deux peintures de Giuseppe Nicola Nasini, représentant à gauche, l’Extase de sainte Catherine et à droite, Sainte Catherine écrivant, inspirée par saint Jean Evangéliste et par saint Thomas d’Aquin, le théologue dominicain dont les enseignements ont nourri l’oeuvre de la sainte. Le même Nasini a peint les fresques de la coupole et des voûtes : la Glorification et l’Exaltation de Catherine, réalisés entre 1701 et 1703. Elle est accueillie au paradis et participe de la gloire céleste.
L’espace était occupé par la cuisine de la famille Benincasa, centre de la vie domestique. A travers la grille située sous l’autel, à l’opposé de l’entrée, nous pouvons encore voir les restes du vieil âtre; durant une extase Catherine tomba dedans mais miraculeusement elle ne reporta aucune brûlure. C’est dans les murs domestiques que la sainte passe la première partie de sa vie, entre prière, pénitence, moments de contemplation et colloques avec le Père Eternel. Puis Dieu lui demanda de soutenir l’Eglise et la Papauté; elle partit alors pour Avignon où elle accomplit la plus grande entreprise diplomatique dans l’Europe du XIVsiècle, qui se conclut avec succès, par le retour du Pape à Rome.
Un siècle après la mort de Catherine, vers 1482-1483, la Confraternité du nom de la sainte, choisit cet endroit comme lieu de réunion. Ils firent installer le retable réalisé en 1496 par le peintre siennois Bernardino Fungai. Le tableau, de tout évidence commandé par la famille des Saraceni, une des familles les plus importantes de Sienne, représente dans la partie centrale l’épisode de la stigmatisation de la sainte, le moment le plus intense de son parcours spirituel. Lorsque le tableau a été fait, le crucifix, aujourd’hui dans l’église devant l’Oratoire, se trouvait encore à Pise; il a été amené à Sienne seulememt quelques décennies plus tard en 1565. Peu de siennois, avant ça, devaient l’avoir vu. Cela explique pourquoi Bernardino Fungai a peint une sculpture au lieu de représenter une croix en bois, ce qu’elle était vraiment. Dans la partie inférieure du retable, sur la prédelle, sont représentées des scènes de la vie de Catherine. Les panneaux latéraux sont occupés par les personnages de Saint Dominique et de Saint Jérôme, oeuvre du même peintre. La partie supérieure avec le Père Eternel et deux Prophètes fut ajoutée quelques années plus tard, en 1567, par le siennois Bartolomeo Neroni, surnommé le “Riccio”.
Vers la moitié du XVI siècle la Confraternité décida d’agrandir l’Oratoire et de le meubler et le décorer sous l’égide du même Riccio qui sut rendre l’ensemble homogène. L’artiste outre quelques tableaux exposés, a dessiné le plafond à caissons bleu et or (réalisé par le graveur sur bois Bastiano di Girolamo). Le riche revêtement en bois des murs qui encadre et relie les tableaux sont aussi de lui. Le choeur en bois et le sol fait de carreaux en faïence polychrome de la Renaissance complètent l’ensemble. Toutefois, de nombreux carreaux, endommagés par le temps, ont dû être changés. Pour préserver ce sol précieux, on a construit une plate-forme surélevée, transparente tout autour du périmètre de la salle; elle permet la déambulation des visiteurs sans provoquer de dégâts ultérieurs.
Les nombreux tableaux qui ornent les parois de ce lieu, commandés par la Confraternité à plusieurs artistes, inspirés par la Légende majeure de Raymond de Capoue, illustrent des épisodes de la vie de Catherine. En outre, dans les quatre angles de la pièce, sont représentés des saint et des bienheureux siennois.
En entrant, à gauche, précédée du tableau Le bienheureux Giovanni Colombini d’Alessandro Casolani, on trouve la première des trois grandes scènes qui décorent la paroi, réalisée par Pietro Sorri en 1587 : Catherine libérant une jeune fille possédée par le démon. La sainte elle même fut plusieurs fois tentée par le démon, mais grâce à l’aide divine, elle résista fermamente à ses assauts.
Le tableau suivant, oeuvre de Cristoforo Roncalli, plus connu sous le nom de Pomarancio, est daté de 1582. Il représente la communion miraculeuse de sainte Catherine. La scène se situe dans la basilique de saint Dominique où pendant la Messe Sainte, au moment où le prêtre rompt le Pain, Jésus-Christ se manifeste à Catherine en se donnant à elle, l’illuminant de la lumière divine. Plusieurs fois, au cours de son existence, la sainte reçut l’Eucharistie des mains de Jésus. Contrairement aux habitudes de son temps, Catherine communiait tous les jours et elle s’adressait à son confesseur avec ces mots “ Père j’ai faim”. Elle considérait l’ostie consacrée la nourriture de l’âme et un extraordinaire don d’amour que Dieu renouvèle constamment pour nourrir nôtre chemin de foi.
Le troisième tableau, exécuté par Lattanzio Bonastri vers 1580, témoignent de la miséricorde de Catherine envers les prisonniers et les condamnés à mort qu’elle allait voir tous les jours, en essayant de convertir leur âme. La sainte est représentée pendant qu’elle demande au Seigneur de sauver deux malfaiteurs conduits à l’échafaud et subissants les tourments des démons. Plus haut, les nuages s’ouvrent et laissent apparaître Jésus, avec, derrière lui, la croix, allusion évidente de la Passion e du supplice que les deux hommes vont subir. Le texte de la légende Majeure d’où est tiré le sujet du tableau, se poursuit avec la repentance et la conversion des condamnés qui affrontent courageusement la mort en se pliant à la volonté de Dieu.
Cette série se termine par la toile de Gaetano Marinelli avec le Bienheureux Ambrogio Sansedoni, qui date de 1872.
Occupée dans la partie centrale par le retable du Fungai, la paroi abrite de chaque côté deux peintures exécutées per le “Riccio” peu avant sa mort survenue en 1571, et peut-être, complétées par Arcangelo Salimbeni. Celle à gauche représente Jésus qui tend la petite croix à Catherine qui la lui avait donné, en le croyant un mendiant. Celle à droite représente la sainte qui offre son manteau à un pèlerin qui n’est autre que Jésus. Les deux scènes font partie des évènements miraculeux qui ponctuèrent la vie de Catherine, et témoignent de son extraordinaire esprit de charité. Rappelons qu’elles sont aussi présentes à l’intérieur de la basilique de saint Dominique, dans la Cappella delle Volte, où ces épisodes eurent lieu
En partant du fond, se trouve un tableau représentant un autre grand saint siennois, Saint Bernardin, peint par Pietro Aldi en 1872.
Suit la première des trois grandes scènes, commençée par le “Riccio” et terminée par Arcangelo Salimbeni en 1578. Le thème en est les Noces mystiques de Sainte Catherine, qui témoigne de sa profonde union avec Jésus. La Légende Majeure en est la source : durant la nuit d’un mardi gras, pendant que le peuple fêtait le Carnaval dans les rues de la ville, Catherine, enfermée dans sa chambre, était absorbée dans la prière. Tout à coup, le Seigneur et la Madone lui apparurent; ils étaient accompagnés de saint Dominique, saint Paul, saint Jean Evangéliste et le roi saint David qui jouait de la cithare. La Madone prit la main droite de la sainte et la tendit à Jésus qui lui mit un anneau précieux, l’épousant dans la foi. Cette expérience est cruciale dans la vie de la sainte : le Christ est pour elle un époux, auquel elle est unie par un rapport de communion et de fidélité. Il est l’être aimé par dessus tout autre être.
La scène successive met en évidence l’activité politique de Catherine. La proximité des deux tableaux peut être considérée représentative des deux aspects fondamentaux de la vie de la sainte. En effet, elle n’était pas seulement une grande contemplative qui vécut des expériences mystiques extraordinaires (comme celle des Noces qu’on vient de décrire), mais aussi une femme d’action qui employa toutes ses capacités intellectuelles, tout son coeur et sa volonté pour de multiples tâches, sociales, de pacification entre les peuples et des transactions diplomatiques entre la Papauté et les gouvernements. La scène, exécutée par “Pomarancio” en 1582-1583, représente la Discussion de Catherine avec le pape Grégoire XI, qui se déroula en Avignon en présence du Collège des Cardinaux. La sainte réussit à convaincre le pape de revenir à Rome.
La troisième scène, oeuvre d’Alessandro Casolani, réalisée entre 1582 et 1583, présente un sujet analogue : La remise des clés du Château Saint Ange à Urbain VI, après que Catherine ait rapporté le peuple à l’obéissance au pape. La toile rappelle le Grand Scisme d’Occident commençé en septembre 1378 : alors que les cardinaux français élirent l’anti-pape Clément VII, Catherine soutint le pape Urbain VI en exhortant qui voulait l’entendre à reconnaître son autorité comme successeur légitime de saint Pierre. Comme on peut le lire dans la Correspondance laissée par la sainte, le pape, les prêtres et en général l’Eglise représentaient pour elle Jésus-Christ sur terre, à qui l’obéissance était due, malgré leur faiblesses humaines.
Le tableau avec le Bienheureux Andrea Gallerani, d’Alessandro Casolani, est le dernier de la série de la paroi de droite.
La paroi opposée à l’autel, où s’ouvrent les deux accès à la pièce, est occupée dans sa partie centrale par une grande niche, commandée par la famille Tolomei, pour les gouverneurs de la Confraternité qui se réunissaient dans cette pièce. En 1600, Francesco Vanni y peignit la Canonisation de Sainte Catherine : le pape Pie II célèbre la cérémonie solennelle en présence de la dépouille de la sainte. Sur les côtés, se trouvent Saint Bernard et la bienheureuse Nera Tolomei, deux religieux siennois qui vécurent entre le XIIIème et le XIVème siècle. Leur présence est due au fait qu’ils appartenaient à la même famille du commitant de la fresque.
Sur chaque côté de la niche, au dessus des portes d’entrée, se trouvent quatre peintures. Celles en haut,à gauche, oeuvre de Rutilio Manetti et de son atelier, exécutée en 1635, représente Catherine enfant surprise par son père en train de prier, avec au dessus de la tête la colombe de l’Esprit Saint. Sa famille qui jusqu’alors s’était opposée à sa vocation, décida de la laisser libre de suivre sa propre voie. En dessous, se trouve le tableau de Pietro Sorri qui a peint Jésus offrant deux couronnes à Catherine, une en or et l’autre d’épines. La sainte choisit la seconde, en affirmant de cette manière sa volonté de se conformer à la Passion du Seigneur.
Les deux dernières peintures, située à droite de la niche, représentent en haut, Catherine en prière devant Jésus attaché à une colonne, réalisée par Rutilio Manetti et son atelier, en 1635, et en bas, Jésus qui échange son coeur avec celui de Catherine, oeuvre de Francesco Vanni, de 1585, témoignage encore une fois de l’union profonde qui la liait au Seigneur
En prenant les escaliers à gauche de la cour d’entrée, on descend à l’Oratoire de la Chambre, qui englobe la petite cellule dans laquelle sainte Catherine priait et se reposait : nous pouvons encore voir, protégée par une grille en fer, la pierre sue laquelle elle avait l’habitude d’appuyer sa tête.
C’est l’espace qui est le plus lié à la première phase de la vie de la sainte; c’est là qu’elle s’isolait prise par la contemplation et faisant souvent acte de pénitence. A sept ans seulement, elle fit voeu de chasteté, tout en renonçant aux plaisirs matériels : elle commenca à se priver de nourriture et de sommeil, à porter le cilice et à se soumettre à la flagellation.
Cette période représente le point de départ du processus de transformation spiritelle mais aussi physique qui caractérise la vie de saint Catherine : comme le battement de coeur, d’abord elle se contracte, se plie sur elle même pour mieux connaître le Christ, et ensuite elle s’ouvre pour répandre la grâce de Dieu dans tout le corps mystique du Christ qui est l’Eglise. Ainsi, au début, le corps de la sainte, contraint à de dures privations, se réduit, diminue. Même l’espace dans lequel elle se meut connaît un rétrécissement progressif : elle s’enferme chez elle, puis ne sort plus de sa chambre; enfin, elle se mure dans une prison spirituelle qu’elle a construite au plus profond de son âme, où le dialogue avec le Christ est sans fin. A ce stade, Catherine n’a rien, n’est rien, mais justement pour cette raison elle est prête à être complétement remodeler par la grâce divine. Son nouveau corps n’est pas réglé par l’ordre biologique, mais fonctionne selon les dispositions de l’Absolu : il se repaît de la nourriture eucharistique et du sang qui surgit de la côte du Christ, il s’identifie à Lui au point d’en prendre les stigmates. Elle reçoit des dons extraordinaires : lévitations, insensibilité au feu, le don d’accomplir des miracles. L’âme dépasse les frontières du corps, en sort, dans l’extase, pour ensuite y retourner et resortir sur les routes du monde. Catherine quitte sa petite cellule, puis sa maison, Sienne ensuite, pour apporter à tous l’amour du Christ qu’elle a connu intimement.
L’Oratoire est une pièce aux dimensions réduites, complètement restaurée en 1874, sur les dessins de l’architecte Pietro Marchetti. Seule la petite cellule est restée en l’état. Contre la paroi du fond se trouve un petit autel qui abrite l’oeuvre d’art la plus antique de l’oratoire : le très beau tableau avec sainte Catherine qui reçoit les stigmates, exécuté par Girolamo di Benvenuto dans les premières années du XVIème siècle.
Par contre les murs ont été couverts de fresques par Alessandro Franchi en collaboration avec Gaetano Marinelli en 1896. Le cycle, inspiré à la Légende Majeure de Raymond de Capoue, commence au fond de la paroi de droite.
Le premier épisode représente Lapa, la mère de catherine qui observe sa fille montant les escaliers sans toucher terre et qui se rend compte de la différence de catherine par rapport à ses autres enfants. La vocation très précoce de Catherine fut un motif de fortes tensions avec sa famille, spécialement avec sa mère qui jugeait son comportement comme étant puérile et qui essaya par tous les moyens d’y mettre fin.
Elle décida de la marier, et après de nombreuses disputes, Catherine rappela à sa mère son choix irrévocable en se coupant les cheveux, chose inconvenante pour les filles de l’époque.
La fresque suivante montre justement la jeune fille se couper la longue chevelure en présence du moine dominicain Tommaso della Fonte, qui l’avait incité à accomplir ce geste par ses paroles. Après cet épisode, sa mère essaya de faire plier Catherine en la contraignant à des tâches ingrates et en l’empêchant de se recueillir et de prier. En outre, elle décida de la priver de sa chambre et de la faire dormir avec l’un de ses frères, en espérant de cette façon, n’ayant plus d’endroits où s’isoler, que Catherine tôt ou tard,s’assagirait.
La jeune fille ne protesta pas; au contraire, elle obéit docilement, en accomplissant tous les travaux qui lui étaient imposés et en remplaçant à la prison matérielle une prison spirituelle dans laquelle elle continua de parler avec le Christ. La famille cessa de la harceler lorsque son père Jacopo surprit Catherine en train de prier avec au dessus de la tête la colombe de l’Esprit Saint; épisode représenté dans la troisième et dernière fresque de la paroi; il comprit alors l’authenticité de la vocation de sa fille et obligea sa femme à céder devant la volonté de Catherine de se consacrer totalement au Christ.
Les fresques continuent sur la paroi adjacente à la petite cellule : à gauche se trouve Sainte Catherine donnant son manteau à un pauvre qui n’est autre que Jésus-Christ et à droite Jésus qui offre une couronne en or et une, d’épines; la sainte prend la couronne d’épines, choisissant ainsi une vie de pénitence, de charité envers les autres et de prière.
Sur la paroi gauche de l’oratoire sont peintes les deux dernières scènes : la première représente les Noces mystiques de Catherine, durant lesquelles la sainte se donne complètement au Christ. La deuxième illustre sa Maternité mystique. La scène est racontée dans la Légende Majeure : une nuit de Noël, La Madone apparut à Catherine et lui mit dans les bras l’enfant Jésus, de cette façon elle la rendit “mère”. La sainte eut des rapports maternels avec ses disciples, et aujourd’hui encore les “catheriniens” la considèrent “maman et maîtresse”.
Visible à travers un grillage à droite de l’entrée de l’oratoire, y sont conservées, à part la pierre qui servait à Catherine pour poser sa tête losqu’elle se reposait, quelques reliques importantes, dans une châsse pendue sur la paroi de gauche : le pommeau de son bâton, la coupe dans laquelle elle mettait les huiles pour soulager les malades de l’Hôpital de Santa Maria della Scala, la lanterne qu’elle utilisait pour leur rendre visite durant la nuit, un morceau de son voile, et le tissu en soie qui enveloppait sa tête lors du transfert de Rome à Sienne en 1384.
Devant le grillage se dresse une statue en marbre représentant sainte Catherine en extase, oeuvre de 1940, du sculpteur Pietro Repossi. Derrière la statue on trouve un meuble qui contient des livres avec les noms des membres de l’Association internationale des “Catheriniens”. Au dessus, sont accrochés des ex-voto, de fidèles qui ont reçu une grâce après avoir prié la Sainte.
Inaugurée en Avril 2006, la chapelle est un lieu conçu comme espace pour la célébration du sacrement de la Pénitence, donc baigné de silence et de recueillement. Le projet des architectes siennois Betti, Fineschi et Lamoretti se base sur l’idée de la centralité d’un oculus lumineux, en verre blanc, qui diffuse la lumière de haut en bas. Lumière est aussi la Grâce de Dieu qui jaillit de sa miséricorde dispensée dans le sacrement.
A droite de l’entrée, se trouve le bénitier dû à l’artiste Alberto Inglesi. On y repère toute une symbologie chrétienne : la barque représente l’Eglise, l’eau qu’elle contient est la mémoire du baptême. La barque /Eglise se meut sur les vagues de l’histoire et dans son sein, elle offre l’eau de vie du baptême et de la Grâce du Christ.
Sur la paroi principale se trouve une fresque réalisée par l’artiste siennois Ezio Pollai. Au centre, est représentée la crucifixion de Jésus, selon la lecture symbolique qu’en fait l’Evangile de saint Jean : l’inscription sur la croix (dans les trois langues, hébraïque, grecque et latine) atteste que le Christ est mort pour tous, adressant à tous les peuples et à toutes les cultures son message d’amour évangélique; la tête inclinée de Jésus exprime la libre volonté d’adhérer au don d’amour, la posture du corps uni à la croix ne symbolise pas le dramme de l’événement, mais plutôt l’intronisation royale du Christ. Dans l’évangile de Jean, la croix, en effet, plus qu’un échafaud est un trône depuis lequel le Christ règne : “ quand je me relèverai de terre j’attirerai le monde à moi” “ (Jean 12, 32). L’incompréhension des hommes devant la mort du Fils de Dieu et le refus de son message d’amour est souligné par l’artiste en mettant de dos, en signe de contrariété, les deux larrons crucifiés aux côtés de Jésus. La position adorante de sainte Catherine est diamétralement opposée à cette attitude de refus; elle va jusqu’à enlacer le bois de la croix. Plus bas, Saint François lève les yeux vers le Seigneur, pris d’une vision mystique. Sur le côté gauche de la croix se tient Marie, folle de douleur, avec le disciple bien-aimé (Jean) qui lui tient la tête. A droite de la croix est représentée la scène de pillage de la division des vêtements du Christ : le comportement de colère avec lequel les habits sont déchirés démontre une insensibilité complète devant le mystère du don de la vie du Fils de Dieu.Au pied du crucifix de droite la souffrance humaine est illustrée à travers une figure féminine qui se couvre la face; un peu plus haut on voit l’image de la famine, symbolisée par le corps décharné d’un enfant porté sur les épaules par une femme aux traits africains.
A gauche de la crucifixion, sont représentés deux épisodes évangéliques parmi les plus importants pour comprendre l’amour infini de Dieu. Le premier est la parabole du “bon samaritain” (Lu 10, 29-37). Celui-ci descend de sa monture et porte secours à un homme qu’on a battu et voIé sur la route. A deux pas de là un prêtre et un lévite se perdent dans des questions religieuses et théologiques, ignorant le pauvre homme; ainsi faisant ils n’appliquent pas la foi dont ils sont en train de discuter.
L’autre épisode est celui de l’adultère pardonnée par le Seigneur (Je 8, 1-11), démonstration de la grande miséricorde de Dieu.
A côté de la croix de droite, nous trouvons deux autres scènes en contraste : la première est celle du mercenaire qui ne s’intéresse pas au troupeau de moutons qu’on lui a confié et s’enfuit lorsque s’approchent des loups (cfr Je 10, 12s). Le mercenaire représente l’homme qui n’a pas fait sien le message d’amour de la croix : la nécéssité d’un amour gratuit par rapport aux autres, un amour qui fait don de la vie et n’utilise pas l’autre. L’autre scène, en antithèse, est la parabole du “fils prodigue” ou du “père miséricordieux” /cfr Lu 15, 11-32). Elle raconte l’histoire d’un fils qui s’enfuit de chez lui, et se retrouvant en grande difficulté, décide de rentrer à la maison. Son père l’accueille à bras ouverts, avec amour; cette parabole exprime la joie miséricordieuse de Dieu pour ses enfants qui reviennent à lui tout en sachant qu’ils ont fait une erreur. Remarquez avec quelle finesse poétique l’artiste a reproduit dans le visage du père miséricordieux, les traits du bienheureux Jean-Paul II, affirmant de cette manière l’identité du vrai pasteur opposé au mercenaire.
L’apparition de Jésus-Christ ressuscité, aux apôtres le soir de Pâques, est représentée dans l’angle droit de la grande fresque. La scène veut communiquer l’effet produit par la crucifixion : le don de la vie et la rémission des pêchés que le Christ ressuscité accorde. La croix n’est pas le dernier mot de Jésus, elle est comme le grain de blé qui doit mourir pour porter des fruits (Je 12, 24).